Le Palais de la Berbie
La construction du Palais de la Berbie
Le nom du Palais vient du mot occitan « bisbia », devenue « verbie » puis « berbie » et qui signifie évêché.
L’édification du Palais se déroule en de nombreuses étapes : la construction elle-même s’étale entre 1228 et 1306. Par la suite, et ce jusqu’au début du XXème siècle, le Palais subira des aménagements multiples.
1. Les origines : les travaux de Durand de Beaucaire (1228-1254)
Jusqu’au début du XIIIème siècle, les évêques d’Albi habitent un groupe de maisons proche de la Cathédrale romane prêté par les chanoines. Les évêques vont profiter de la déchéance des vicomtes d’Albi, les Trencavel, lors de la croisade des albigeois, pour réorganiser à leur profit la perception des impôts.
Cet enrichissement soudain permet à l’évêque Durand de Beaucaire de marquer sa puissance au travers d’une nouvelle résidence. Elle se compose d’une salle féodale (aula) à laquelle est accolée une tour ; à l’ouest est édifiée la Tour Saint-Michel (à deux niveaux) destinée au tribunal et aux prisons ecclésiastiques.
2. Les travaux de Bernard de Combret (1254-1271)
Cet évêque va terminer les travaux de son prédécesseur en donnant au Palais son aspect de citadelle : il relie entre eux les anciens bâtiments. L’évêque craint pour sa sécurité à cause du pouvoir royal qui soutient les revendications de la Commune d’Albi et à cause des révoltes populaires, les murailles sont donc beaucoup plus sophistiquées du côté de la Ville, principal adversaire de l’évêque, que du côté Tarn, « rempart » naturel.
Par ailleurs, afin d’éviter tout risque d’incendie, il réalise le couvrement en voûte d’ogives de toutes les salles de la forteresse.
3. Les travaux de Bernard de Castanet (1277-1306)
Ces travaux se font en parallèle avec l’édification de la nouvelle Cathédrale Sainte-Cécile. Le caractère ambitieux, autoritaire de l’évêque déchaîne contre lui la colère royale et la haine des albigeois. Craignant pour sa sécurité, il renforce à nouveau le bâtiment.
Il élabore un double-donjon, la Tour Mage, qui se compose :
. de l’ancienne Tour Saint-Michel, surélevée d’un étage qui accueille la chapelle privée de l’évêque et la salle officielle.
. d’une nouvelle tour, la Tour Sainte Catherine, dans laquelle réside désormais l’évêque.
L’ancienne résidence, la Vieille Berbie, devient le tribunal ecclésiastique. La courtine de Bernard de Castanet est renforcée par des contreforts hémisphériques (côté jardins). Enfin, il lance deux courtines à l’ouest et à l’est, qui dévalent les escarpements vers le fleuve, créant ainsi de nouveaux espaces dépendants du Palais et permettant une fuite éventuelle vers le Tarn.
4. 1309-1474 : travaux de la période intermédiaire
Durant cette période, les évêques se succèdent sans apporter de changements notables aux aménagements du Palais. La Grande Peste Noire et la Guerre de Cent ans rognent la puissance et les revenus des évêques.
Une courtine ferme le système défensif au bord du Tarn entre les tours édifiées par Bernard de Castanet. Du côté de la ville, on aménage une nouvelle porterie avec un terre-plein bastionné.
5. Les travaux de Louis d’Amboise (1474-1503)
Il introduit dans le Palais la mode de la Renaissance. Il édifie à l’Est du Palais, sur la muraille de Castanet, sa propre résidence. Elle comprend une série d’appartements, la Tour d’Amboise remaniée, ainsi qu’une galerie édifiée sur la courtine. Par ailleurs, il facilite l’accès à la Tour Mage par un escalier à vis partant de plein-pied avec la cour.
6. Les travaux du XVIIème siècle
Le rôle de forteresse donné au Palais s’efface petit à petit. En 1598, le Gouverneur militaire d’Albi ordonne de démolir et raser les fortifications et défenses avant de rendre le Palais à l’Evêque. Le caractère ruiniforme des parties supérieures du donjon sur la face Nord date de cette époque.
1635-1676 : Gaspard Daillon du Lude double l’aile d’Amboise côté cour par deux galeries superposées surmontées d’une terrasse avec de grandes baies classiques. Il abaisse de deux niveaux la courtine Sud et établit un passage « abrité » pour gagner la Cathédrale. Les décors Renaissance de l’Aile d’Amboise sont remplacés par un décor classique.
1678-1687 : Hyacinthe Serroni redécore la Chapelle de la Vieille Berbie de stucs faux marbre achevés en 1685.
1687-1703 : Legoux de la Berchère aménage les appartements de l’Aile des Suffragants. Il élève contre la muraille du grand donjon des galeries superposées symétriques à celles de l’Est. Une terrasse est aménagée au pied des contreforts de Castanet, ainsi que des jardins dans l’espace contenu par l’enceinte Nord. Celle-ci est abaissée et transformée en promenoir.
7. Les travaux du XVIIIème siècle
La forteresse s’ouvre vers la ville : un très grand portail percé sous l’Aile d’Amboise ouvre désormais sur le nouveau Quai Choiseul.
En 1764, Choiseul Stainville lance, perpendiculairement à l’Aile d’Amboise, une galerie et une bibliothèque.
Le Cardinal de Bernis creuse dans la Tour Nord-Ouest un petit salon qui ouvre sur le point de vue le plus lointain du Tarn.
Il aménage le jardin : des statues à l’Antique symbolisant les saisons sont placées sur la courtine basse.
8. Les travaux du XIXème siècle
La Révolution et l’Empire envisagent de faire du Palais, devenu « édifice national », un « Museum d’histoire naturelle, d’art et d’antiquités ».
Un nouvel accès à la cour médiévale est percé à travers l’Aile d’Amboise.
Seule la Bibliothèque du Cardinal de Stainville va garder sa fonction d’origine.
En 1823, le siège archiépiscopal d’Albi est relevé et des travaux de restauration sont entrepris ; en 1862, sont classés la Chapelle Notre-Dame et les Salons du Lude et de Bernis.
En 1905, la séparation de l’Eglise et de l’Etat enlève définitivement au Palais sa fonction primitive.
9. Les travaux du XXème siècle
1909-1929 :restitution des états antérieurs : façade de l’Aile d’Amboise du XVème siècle et destruction des galeries accolées au donjon.
1922 : Inauguration des galeries consacrées au peintre Henri de Toulouse-Lautrec.
1945-1985 : restaurations concernant les charpentes, les couvertures et les menuiseries extérieures.
1996… : projet d’agrandissement et de restructuration du Musée Toulouse-Lautrec
Le grand escalier
Le volume qui contient l’escalier est le vestige de la tour féodale qui accostait la salle officielle « aula » du 1er Palais. Elle fut dérasée jusqu’à son niveau actuel après les guerres de Religion.
Lorsque Gaspard Daillon du Lude abandonna la vieille Tour Mage pour installer ses appartements dans l’Aile d’Amboise, il eut besoin d’un accès de prestige et récupéra la souche de la tour devenue inutile. Il y fit édifier l’escalier actuel en conservant l’une des voûtes d’ogives intermédiaires, datant des aménagements de Bernard de Combret, et il fit peindre sur les quartiers de voûtes les quatre Vertus Cardinales à l’imitation d’un modèle romain (1636 – Vertus Cardinales peintes par le Dominiquin aux pendentifs de San Carlo Ai Catinari à Rome).
La rampe à balustre et la boule de l’escalier datent du XVIIème siècle.
Le portail
Le portail extérieur (entrée du Musée) a été ouvert et décoré par l’Evêque Hyacinthe Serroni après 1678.
La salle d’accueil (billetterie + boutique)
Salle inférieure du tout premier Palais épiscopal, on s’interroge pour savoir si elle constituait à l’époque une chapelle inférieure ou bien une sorte de tribunal, l’officialité, ou une salle de garde commandant l’accès à l’escalier circulaire qui ne subsiste qu’en partie haute.
Les Jardins
Ils sont organisés par Hyacinthe Serroni entre 1678 et 1687. Il dispose les terrasses et contre-terrasses d’un parterre à la française, et des escaliers de pierre avec longues et nobles balustrades armoriées. Puis il convertit les courtines Nord et Ouest en promenoirs, et l’ancienne tour de barbacane, couverte d’une flèche pyramidale en reposoir où il appose en 1630 son cartouche « d’azur au lion d’or sciant un rocher de même avec une scie de même, surmonté d’une étoile de cinq rais aussi d’or ».
Les courtines Est sont élargies soit par des encorbellements, soit par un portique.
Les statues à l’Antique représentant les saisons ont été ajoutées au XVIIIème siècle par le Cardinal de Bernis.
© Musée Toulouse-Lautrec, Albi (81)