Lingère à la brouette

Étude pour le grand panneau du foyer-buvette du théâtre du Capitole de Toulouse.
Paul Pujol, l’architecte, est directement contacté par Henri Rachou qui se propose de réaliser ces décors muraux pour la somme de 20.000 F.
Le peintre retient ici le principe d’un décor panoramique, comme en témoigne la grande esquisse peinte en 1905 des trois panneaux réunis. La composition finale qui se développe habilement sur trois panneaux séparés, prend pour thème les bords de la Garonne vus depuis la pointe ouest du port Viguerie.
Henri Rachou imagine une grande fresque populaire autour du thème des pêcheurs de sable, déjà mis à l’honneur par Casimir Destrem
en 1883, et des petits métiers liés au fleuve. La silhouette des coupoles et clochers de Saint-Pierre, des Jacobins, de la Daurade et de la Dalbade scande le haut de la composition lumineuse et rompt l’alignement des quais. Rachou peint ici l’une des ses rares compositions animées.
Dans ces trois grandes toiles marouflées hommes et femmes partagent le même quotidien laborieux des pêcheurs de sable déchargeant leurs
embarcations.
Dans cette vision plus sociale des bords de Garonne, le peintre parvient à animer la scène autour d’un nouveau “cycle du sable”. Sa lecture de la gauche vers la droite donne à voir successivement l’arrivée à quai sur les grandes barques, le déchargement puis l’enlèvement des tombereaux de sable accompagnés des laveuses aux bras chargés, qui projette le
spectateur vers le quartier populaire de Saint-Cyprien. Puisé au fond des eaux calmes, le précieux matériau devient l’enjeu constructif d’une
ville verticale dont l’auteur déroule habilement les quais et façades. La chaude lumière qui baigne la scène, les attitudes calmes, le naturel des poses figent l’instantané de cette narration dépouillée et quasi religieuse du travail.