Grand plat à décor Bérain
Chronologie
Technique
Dimensions
Numéro d’inventaire
Le musée Ingres a pu acquérir un ensemble de faïences produites à Ardus, non loin de Montauban, sur les bords de l’Aveyron, dans une faïencerie qui obtint le titre de « Manufacture Royale » en 1749 après avoir été créée en 1737 par le baron François Duval.
Connue surtout pour sa production de grand feu à décor bleu et blanc où s’illustrèrent successivement les peintres Denis Molinié et Mathieu Rigal, la manufacture se mit à la faïence de petit feu avec l’arrivée du peintre Antoine Quijou en 1775. La manufacture déclina avant même la Révolution de 1789 pour ne plus produire, à la fin du XVIII° siècle, que des pièces utilitaires blanches ou de simples poteries.
L’ensemble acquis par le musée permet de suivre la production de la Manufacture sur tout le XVIII° siècle. Certaines pièces étaient connues, tel ce beau et grand plat à décor Bérain, d’autres non
La provenance de cet ensemble en fait également le prix puisqu’il a été patiemment constitué par l’une des plus grandes spécialistes de l’histoire de la faïence du Sud-Ouest de la France, Marie-Louise Galinier. Le musée Ingres pourra témoigner du goût et des recherches de cette collectionneuse avisée.
Ce plat constitue la pièce la plus importante de l’ensemble consacré à la production Tarn-et- garonnaise de la collection Galinier. Documenté depuis 1876 par Edouard Forestié dans son livre sur les faïenceries du Tarn-et-Garonne, il y figurait comme l’une des pièces majeures en raison de la qualité exceptionnelle de son décor Bérain ainsi que de son originalité. En effet, au milieu des traditionnels motifs d’arabesques, rinceaux, lambrequins, mascarons … qui composent le vocabulaire habituel du décor Bérain, on remarquera, au centre du plat, la scène cocasse du dodu lapin en train de cuire à la broche, surveillé par deux singes costumés en cuisinier sous le regard amusé de deux sphinges. Plus haut, un médaillon contient le traditionnel moulin, emblème de la fabrique Molinié, qui vient répondre à la signature placée au bas du décor.
Ce plat remarquable par la qualité de la richesse de son ornementation ainsi que l’élégance de ses formes est typique des débuts de la production de la faïencerie d’Ardus. Le baron François Duval, son fondateur, y avait fait venir dès son origine des ouvriers chevronnés ayant exercé dans des centres importants, tel le peintre Denis Molinié, signalé en août 1733 à Samadet. Ce dernier avait appris son art à Moustiers ou à Nevers. E. Forestié signale dans son ouvrage trois autres plats non signés mais datés de 1739 où l’on retrouve la même qualité de dessin et surtout la même verve que dans ce plat réalisé dans les fours d’Ardus avant l’arrivée du maître Mathieu Rigal en 1745, qui transformera le décor Bérain en y ajoutant des portraits, sa spécialité.
Le peintre montalbanais Albrespy fut le premier possesseur connu de ce plat qui fut vendu, il y a quelques années à Mme Galinier par l’un de ses descendants, M. Vielle. Le céramoloque M. Caillol racontait que son fêle provenait d’une partie de ball trap effectuée par les allemands pendant la guerre. Ce plat tombé dans un fourré aurait miraculeusement survécu.