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Édito

Route de l’Antiquité en Occitanie : la céramique sigillée

Parcours thématiques

Une vaisselle à la mode antique

C’est une spécificité historique de la région Occitanie peu connue du grand public. Entre le 1er et le 2ème siècle après J.-C, ce territoire est le plus important centre de production de céramique sigillée de tout l’Empire Romain, avec deux grands sites de production : le site de La Graufesenque en Aveyron et le site de Montans dans le Tarn.

La céramique sigillée (sigillum, le sceau) est caractéristique de l’époque romaine. Elle se reconnaît à sa couleur brun-rouge-orangé, son aspect luisant (c’est une céramique imperméable cuite à forte température) et à ses décors en relief qui l’ornent parfois. Ni vaisselle de grand luxe, ni céramique commune, mais plutôt gamme intermédiaire, de semi-luxe, elle est destinée au service de table dans la plupart des foyers, plus ou moins aisés. Certains plats sont signés du nom du potier ou du décorateur. La plupart des récipients ne présentent cependant pas de décors : on parle de céramique sigillée lisse.
Le vaisselier comprend une quarantaine de types principaux : plats et assiettes, bols, tasses, gobelets qui ont des formes calibrées et standardisées, indistinctement fabriquées par tous les potiers d’une même période.

Origine italienne, consécration gallo-romaine

Aux origines de la céramique sigillée, il faut citer successivement la céramique Etrusque, celle de Campanie, puis les ateliers italiques de Toscane, au 1er siècle avant J.-C. A Arezzo, localité située entre Rome et Florence, 400 potiers créent une véritable industrie dont la diffusion accompagne la conquête et l‘expansion romaine d’Italie en Espagne, en Narbonnaise, en Germanie, et jusqu’aux confins de l’Empire, au début du 1er siècle après J.-C.

Quelques comptoirs sont ensuite créés dans ces pays, vite concurrencés par les ateliers de la Gaule méridionale : la Graufesenque, le plus grand et le plus productif (Millau, Aveyron), Montans, également très développé (Tarn), mais aussi Banassac (Lozère). Les ateliers de la Gaule Centrale (Lezoux en particulier) prennent ensuite le relais.

 

L’implantation et le développement de ces ateliers de production sont liés à la présence de savoir-faire potiers pré existant mais également à la richesse des ressources naturelles indispensables à la fabrication des céramiques sigillées : l’eau, la terre et le bois.

Au milieu du 1er siècle après J.-C., les potiers maîtrisent parfaitement la technique de fabrication. Leur activité presque industrielle est planifiée et la standardisation règle la vie des officines. La production a une apparente uniformité.

Chaque année voit sortir des mains des potiers plusieurs centaines de milliers d’assiettes, plats, coupes mais aussi cruches, gourdes….

La fabrication de la céramique sigillée : la technique de la sigillée moulée

Les récipients qui présentent des décors sont tournés à l’intérieur de moules en terre cuite, au décor creux réalisé au préalable à l’aide de poinçons. Le décor s’imprime ainsi en relief sur le pourtour du récipient. Les motifs représentent des végétaux, des animaux, des scènes mythologiques ou de la vie quotidienne.
Crédits des illustrations ci-dessous : V. Malbert / Archéosite – Agglomération Gaillac-Graulhet

Secrets de cuisson

Après façonnage, engobage et séchage, la vaisselle en sigillée est cuite dans un four à tubulures (petites cheminées) l’isolant des fumées et des gaz de combustion. Cette cuisson, à haute température (1050 °C) est dite oxydante. Elle a une incidence sur l’aspect rouge brillant et vitrifié des surfaces des poteries (on parle d’engobe grésé).

Un potier fabrique une pièce de sigillée

Il existe 2 types de poinçons : les poinçons décoratifs, qui représentent des végétaux, des animaux, des scènes mythologiques ou de la vie quotidienne et les poinçons signatures, qui permettent d’apposer une signature (un nom ou un symbole). C’est de cette empreinte que vient le nom de sigillée (un nom inventé au 19ème siècle) : du latin sigillum, le sceau.  La signature permet aujourd’hui de tracer l’origine d’un récipient.

Les décors sont réalisés en creux sur les moules grâce à des poinçons,  les décors apparaîtront en relief sur la paroi externe des poteries.

Les coulisses de la fabrication

Division du travail et grandes cuissons mutualisées

A la Graufesenque (Millau), chaque fournée pouvait contenir entre 20 000 et 30 000 récipients à cuire. On ne cuisait qu’entre avril et septembre, à raison d’une mise à feu toutes les deux ou trois semaines. Une cuisson nécessitait environ 60 stères de bois.

Les responsables des fours inscrivaient sur des assiettes le nom de chaque potier fournisseur, le type, la dimension et la quantité de chaque catégorie de récipients à cuire. Ces assiettes appelées « comptes de potiers » étaient mises à cuire avec la fournée qu’ elles détaillaient. Près de 200 comptes de potiers gravés en écriture cursive latine ont ainsi été retrouvés à la Graufesenque, 2 seulement à Montans. Ils constituent les témoins précieux de cuissons mutualisées.

Par ailleurs, des milliers de récipients défectueux, mal cuits, déformés ou collés entre eux (les moutons), étaient rejetés dans des fosses. Au final, à travers tous ces vestiges se dessine l’organisation d’une production déjà industrielle où la spécialisation du travail est importante, depuis l’extraction de l’argile jusqu’au négoce, en passant par les activités de façonnage et de cuisson.

Un commerce lucratif

Le trésor de 40 pièces d’or (aurei) de Montans, daté du milieu du 1er siècle après J.-C., est probablement le fruit de l’enrichissement d’un patron d’atelier. Il a été retrouvé en 1992, enfoui sous les fondations d’un bâtiment du quartier d’habitations

Les arts de la table, véritable vecteur de romanisation

Grâce aux signatures et aux décors des récipients, il est assez facile de reconnaître les productions venant des différents centres de production. Diffusée surtout entre 20 et 120 après J.-C, cette céramique a emprunté par voie de terre et de mer les circuits du négoce qui accompagnait les soldats de l’Empire Romain : de l’Ecosse à l’Afrique du Nord ; du Portugal à la Roumanie, et à la Syrie.

Les productions de Montans ont été essentiellement diffusées dans l’ouest de la Gaule et principalement en Aquitaine et, au-delà, jusqu’au Royaume Uni et au nord de l’Espagne. Elles essaimaient grâce à l’important axe commercial fluvial que constituent le Tarn puis la Garonne vers l’Atlantique à partir des comptoirs situés dans le Bordelais et en Vendée où de grands négociants en terre cuite (negociatores reicretariae) organisaient d’efficaces réseaux commerciaux, avec des relais de stockage et des entrepôts de redistribution.

On retrouve celles de la Graufesenque partout en Gaule, mais aussi en Germanie, en Bretagne (Angleterre et Ecosse), dans la Péninsule ibérique, sur les côtes africaines, en Italie, en Grèce et même sur les bords de la Baltique, de la Mer Noire et de la Méditerranée orientale. On en a signalé jusqu’en Inde et au Soudan. On a même retrouvé une caisse contenant 90 coupes à décors moulés dans les cendres de Pompéi. C’est vraisemblablement par des convois de mulets que la marchandise est expédiée. L’axe nord-sud rejoignait, à Cessero (Saint-Thiberry), la voie Domitienne, grande route de la Méditerranée, qui unissait le Rouergue à Narbonne, port d’exportation vers l’Italie, l’Espagne et l’Afrique.

Epave du Culip 4 lors de sa fouille © Javier Nieto

Les routes maritimes

Le port de Narbonne a joué un rôle d’importance majeure pour la diffusion de la sigillée de La Graufesenque. Les recherches récentes ont confirmé son statut de port entrepôt, à partir duquel les marchandises étaient réexpédiées à différentes échelles : échelle locale grâce à la navigation le long des côtes, sur de courtes distances (le cabotage), et à l’échelle provinciale et de l’Empire grâce aux navires de haute mer (navigation hauturière).
Les routes maritimes ont été privilégiées comme le montre le grand nombre d’épaves contenant de la céramique sigillée de La Graufesenque : Culip 4 au large du Cap Creus (Catalogne), El Guadiaro dans le détroit de Gibraltar, Cassidaigne au large de Cassis, Plage d’Arles 5 au large de la Camargue, ou encore Lavezzi 2 au sud de la Corse.

L’importance de la céramique sigillée en archéologie

Un matériau d’étude abondant

Rares sont les produits de l’activité humaine pouvant rester enfouis longtemps dans le sol sans subir de fortes dégradations.
Les archéologues ont trouvé avec la céramique sigillée une trace de l’activité humaine qui se dégrade très lentement, qui a été l’objet d’une très large diffusion à partir d’un petit nombre de lieux de production et dont l’évolution des formes et de la décoration a été rapide.

Un élément de datation

Grâce à des repères précis concernant son évolution, la sigillée permet de dater les couches archéologiques dans lesquelles elle est trouvée.
Dès la toute fin du 19ème siècle, les archéologues ont eu le souci d’établir une histoire générale de la sigillée, et notamment Hans Dragendorff ou Joseph Déchelette qui ont donné leurs noms aux typologies encore employées aujourd’hui.

Les vestiges des ateliers de potiers

Sur les zones de production, les archéologues retrouvent les fours, les fosses-dépotoirs contenant les rebuts de cuisson, des bassins servant à la décantation des argiles et de grandes aires de travail pavées de galets, qui sont intégrées aux hangars de stockage du bois et des matières premières où se fabriquaient les vases. Les murs de ces bâtiments sont montés en terre crue, alors que les soubassements sont faits de plusieurs arases de tuiles.

Les musées participants

Le réseau des professionnels des musées d’Occitanie, Occitanie Musées, remercie chaleureusement les établissements ayant participé à cette exposition virtuelle :

Parcourez la route de l'Antiquité en Occitanie, une initiative du réseau Occitanie Musées

L’Occitanie est un territoire profondément marqué par la période antique. Cet héritage y est visible au travers de collections de musées et de sites formant un patrimoine unique et exceptionnel ! Les professionnels de musées d’Occitanie, regroupés au sein du réseau Occitanie Musées, vous proposent d’explorer ce riche patrimoine avec des parcours thématiques explorant les différentes facettes de l’Antiquité en Occitanie.
 

Cette page vous a invité à découvrir la céramique sigillée antique en Occitanie. Retrouvez également notre parcours sur la mosaïque antique en Occitanie