La Justice
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Cette Justice est, par excellence, une représentation allégorique. Elle se présente de profil, sa chevelure noire ceinte d’une couronne de feuilles de chêne dorées. Ses yeux verts sont en harmonie avec les frondaisons qui l’abritent et avec l’environnement forestier. A la suite des ses fréquents séjours dans le Tarn auprès de son ami Jean Jaurès, Henri Martin associe dans sa symbolique personnelle le travail intellectuel et la réflexion avec la forêt de pins. Les arbres ici déploient leurs longues branches à l’horizontale comme des bras accueillants et protecteurs. La Justice elle-même n’a rien de rigoureux ou d’austère, même si divers attributs la définissent au premier regard du spectateur. Sur sa robe d’un blanc immaculée, elle a revêtue le long manteau rouge bordé d’hermine propre aux magistrats. De la main gauche, elle maintient la table de la Loi posée sur sa cuisse, tandis que sa main droite tient fermement la balance dont les plateaux de cuivre luisent doucement.
Ce tableau fut-il commandé par Paul Riff lui-même ? C’est en tout cas l’occasion d’évoquer ce collectionneur avisé des œuvres d’Henri Martin.
Paul-Louis Riff est né le 16 octobre 1858 à Maubeuge dans une famille d’origine alsacienne. Il épouse Jeanne Horville le 20 septembre 1888 à Amiens. D’abord avocat près la Cour d’Appel d’Amiens, il se tourne vers la magistrature. En 1885 Paul Riff est nommé juge à Senlis, puis à Compiègne en 1886 et Avesne-sur-Helpe en 1887. Il est ensuite nommé président en 1897 dans cette dernière ville proche de Maubeuge. Enfin il est nommé conseillé à Douai en 1903, puis président de chambre près cette même Cour d’Appel. Paul Riff est fait chevalier de la légion d’honneur le 27 juillet 1918 pour « services rendus à la France en présence de l’ennemi », il sera fait officier le 31 décembre 1923. Son dossier à la Légion d’Honneur mentionne : « Ce magistrat de haute valeur morale et professionnelle, pratiquant largement de ses deniers la bienfaisance avec une jalouse discrétion, a contribué par son inclassable énergie à maintenir les établissements hospitaliers et d’assistance de Douai pendant l’occupation Allemande et à sauvegarder leur patrimoine immobilier et mobilier.
A du à son dévouement d’être interné comme otage ». Après la guerre, il prend une retraite prématurée car la captivité a rendu sa santé fragile et il doit se consacrer à sa fille unique Pauline, malade elle aussi des suites de la guerre. Ils s’installent à Nice. Paul Riff décède à Douai en 1929, il est enterré à Nice au cimetière de Cimiez.
Collectionneur secret : les relations de Paul Riff avec l’artiste nous sont peu connues à ce jour, pourtant quatre tableaux sont dédicacés, soit à lui, soit à son épouse ou à leur fille Pauline. Les étiquettes « dépôt des […] avril 1917, M. Riff rue de la Mairie Douai », souvent signalées les descriptifs, se référent très certainement à des oeuvres mises à l’abri par Henri Duhem pendant la guerre. L’avocat Henri Duhem (1860-1941), peintre, collectionneur et ami douaisien d’Henri Martin et de nombreux autres artistes, reste le révélateur des liens effacés que Paul Riff entretenait avec le peintre.
Parmi les 64 lettres adressées par Henri Martin à Henri Duhem conservées au musée de la Chartreuse de Douai, quatre mentionnent le nom de Paul Riff et témoignent qu’il est un fin collectionneur, assez éclairé pour être l’auteur de la préface au catalogue de l’exposition Henri Le Sidaner à la galerie Mancini en 1897.
D’après le catalogue de la vente aux enchères du 1er avril 2012 organisée par Rennes Enchères.
Ancienne collection Paul Riff, oeuvre acquise avec l’aide du FRAM, du Fonds du Patrimoine, du Conseil Général du Lot et de l’Opération Mécénat.