Bombardement au Vietnam
Chronologie
Technique
Dimensions
Statut administratif
Numéro d’inventaire
C’est à la suite de l’exposition rétrospective consacrée à l’artiste que le Musée Goya a obtenu le dépôt du grand tableau Bombardement au Vietnam réalisé en 1969 et acquis par le Musée d’Art et d’Histoire de la Ville de Saint-Denis. Blasco Mentor n’a jamais oublié ses origines hispaniques ainsi que l’horreur de la Guerre Civile espagnole. Il a tenu à stigmatiser le second conflit vietnamien qui dans un contexte fortement marqué par la décolonisation et la lutte des puissances occidentales contre les régimes d’obédience communiste a ravagé l’ancienne Indochine de 1964 à 1975. Dans ce conflit particulièrement âpre et relayé en abondance par les médias, les bombardements contre les villes du Nord-Vietnam et en particulier Hanoï furent terribles et supérieurs en intensité à ceux de la Seconde Guerre Mondiale en Allemagne. Hormis les critiques des pays de l’Est, de la Chine, les mouvements pacifistes ont été nombreux à dénoncer cette destruction aveugle des populations ainsi que du milieu naturel. Mentor, proche du parti communiste à l’époque, s’est souvenu de Guernica de Picasso pour produire une œuvre hallucinée dans un registre très différent mais néanmoins spectaculaire. De fait, l’image devient symbole d’horreur absolue, cauchemar terrifiant par la mise en page audacieuse en contre-plongée de ces figures déchaînées, hurlantes et composites. Il s’agit bien d’une pluie de monstres à la fois morceaux de chair et de métal où l’on reconnait certaines formes familières animales (cheval) alliées aux structures du machinisme le plus échevelé. L’œil se perd dans ce conglomérat de plans sans perspective hérissé de dents acérées, de griffes puissantes. L’impression de malaise profond en émane de façon immédiate car toute la surface du tableau se trouve occupée avec un effet optique qui accentue la dynamique de l’ensemble : il nous semble impossible d’échapper à cette horde tentaculaire, synonyme de mort et de souffrance qui va s’abattre depuis le ciel noir.
Bombardement au Vietnam fut, à l’époque, une œuvre emblématique de la Ville de Saint-Denis exposée dans le hall d’entrée du Musée d’Art et d’Histoire. Elle n’a rien perdu de sa force d’évocation tout comme « La guerre » de Marcel Gromaire ou encore « Puissance aveugle » de Rudolf Schlichter (1937) qui, encore une fois, prouve la capacité des artistes à représenter l’inimaginable.
Les tonalités de la palette volontairement assombries avec parfois des fulgurances de rouges et de bleus accentuent l’effet dynamique ainsi que l’équilibre de la composition. L’œuvre de Mentor restaurée pour l’exposition, a retrouvé ainsi toute sa puissance évocatrice.
J.L. Augé, conservateur en chef du musée Goya, 2012