Ingres visitant la nouvelle école de dessin de Montauban sous la conduite de son ami Gilibert en 1826
Technique
Dimensions
Numéro d’inventaire
Malgré son désir si souvent renouvelé, le peintre ne revint qu’une seule et brève fois à Montauban, du 12 au 22 novembre en 1826, à l’occasion de la remise du Vœu de Louis XIII destiné à la cathédrale de Montauban. On pense que c’est en souvenir de cet unique retour d’Ingres dans sa «cara patria», que son fidèle ami Jean-François Gilibert peignit ce tableau pieusement conservé durant toute sa vie puis à ses descendants.
Au centre de la composition, on reconnaît, à gauche, la silhouette rebondie du peintre aux côtés de son ami Gilibert, dont l’allure élégante nous renvoie au portrait qu’Ingres peignit peu avant son départ pour Rome.
Cette scène de retrouvailles entre les deux amis d’enfance dans leur ville natale, se déroule dans l’édifice même qui abrite aujourd’hui le musée consacré à l’artiste. Sous la conduite de Gilibert, le peintre visite l’école de dessin nouvellement fondée et installée dans l’Hôtel de Ville, ancien palais épiscopal devenu aujourd’hui le musée Ingres. Une lettre du vicomte de Gironde, alors maire de Montauban, adressée au Ministre de l’Intérieur le 28 août 1828, précise les circonstances de cette création : « La fondation du Musée ne remonte pas aussi loin que le goût des Montalbanais pour les Beaux-Arts et particulièrement pour la peinture. Elle coïncide avec celle de l’établissement de l’Ecole de Dessin linéaire et d’antiques qui date du 1er juillet 1822. C’est en effet à cette époque que nous obtînmes, de la munificence royale, des modèles en plâtre des principaux chefs-d’œuvre de sculpture du Musée Royal. Ils sont placés dans la vaste salle du premier appartement de l’Hôtel de Ville, disposés à grands frais pour recevoir ce précieux dépôt ».
Les nombreux moulages d’antiques (Vénus de Médicis, Diane de Versailles, Antinoüs, Apollon et Torse du Belvédère, Tête de Niobé…) qui entourent Ingres, Gilibert, et les jeunes peintres du premier plan, situent la scène dans cette vaste salle du premier appartement de l’Hôtel de Ville d’alors, destinée à recueillir la première collection du musée de Montauban. On devine, à l’arrière-plan, l’activité de l’école de dessin.
Document des plus précieux sur l’histoire du musée, notre toile constitue également un émouvant témoignage de l’amitié quasi-fraternelle qui unit Jean-François Gilibert à son compatriote en offrant comme une réponse au portrait qu’Ingres fit de lui vingt ans plus tôt à Paris.
Car, comme il l’écrivait lui-même dans sa correspondance, Jean-François Gilibert est son premier et plus fidèle ami : « Tu es pour moi le plus ancien (puisque nous nous sommes connus enfants) et le seul véritable ami ; et tels nous serons toujours, j’espère, tant que nous vivrons ».
Cette œuvre, acquise grâce au soutien des FRAM et au mécénat de la Société des Amis du musée Ingres, a fait l’objet d’une souscription nationale permettant à chacun de participer à l’enrichissement du musée Ingres en donnant à voir réunis ces deux compagnons montalbanais sur les cimaises mêmes du musée qu’ils visitèrent ensemble jadis, alors qu’il n’était encore qu’un lieu d’enseignement donnant à voir la grande leçon de l’Antique, essentielle pour le maître du Bain turc, ce « dernier grand païen qui vit le monde avec les yeux d’un Grec attardé»